- JUBÉ
- JUBÉJUBÉVenant du premier mot de la prière «Jube, Domine, benedicere» qui était chantée avant les leçons, le terme «jubé» est utilisé pour désigner une clôture transversale de bois ou plus souvent de pierre qui ferme le chœur d’une église, généralement entre les deux piles orientales de la croisée du transept. Cette clôture est percée d’une ou de plusieurs portes et souvent couronnée d’une tribune à laquelle on accède du chœur par des escaliers. Le jubé, qui a remplacé l’ambon, sert à la lecture des Évangiles, des Épîtres, ou à la prédication. Les premiers jubés ne comportent aucun décor sculpté mais certains sont ornés de scènes peintes. C’est au cours du premier tiers du XIIIe siècle que le décor sculpté sera intégré à l’architecture, sans doute dans le nord de la France. C’est surtout à partir du XIIIe siècle qu’on entreprit d’édifier des jubés dans la plupart des grandes églises (Chartres, Bourges, Paris, Le Bourget-du-Lac, La Chaise-Dieu, Strasbourg, Naumbourg en Allemagne). La plupart portaient, sur la face regardant vers la nef, soit des statues isolées de saints, comme à Marburg (Allemagne), soit des cycles narratifs sculptés illustrant la Passion du Christ (Paris, Bourges) ou l’enfance du Christ (Chartres). Au centre se dressait généralement un crucifix accompagné des statues de la Vierge et de saint Jean, le jubé prenant ainsi la suite du tref, poutre de gloire lancée en travers de la nef dans les églises paléochrétiennes. Le jubé peut se compléter d’une clôture de chœur qui vient fermer totalement le sanctuaire et qui porte des reliefs dont les thèmes correspondent à ceux du jubé (Chartres, Amiens, Albi). Aux XVe et XVIe siècles, au contraire, certains jubés seront percés d’arcs, permettant aux fidèles de «voir» les offices. Ce qu’on a appelé l’«ambonophobie» fit détruire, comme à Bourges, la plupart des jubés aux XVIIe et XVIIIe siècles parce qu’ils coupaient la perpective du chœur et qu’ils ne s’accordaient plus avec la nouvelle liturgie. Toutefois, les plaques de reliefs endommagées furent réutilisées dans la maçonnerie ou retournées pour servir de dallage, comme à Chartres, ce qui a permis la conservation de certains éléments. Certains jubés échappèrent à la destruction, tels ceux de Saint-Étienne-du-Mont à Paris (fin du XVIe s.), du Faouet dans le Morbihan (XVe s.) ou de Brou en Savoie (XVIe s.); de nombreux jubés sont conservés en Grande-Bretagne (abbaye de Westminster à Londres).• 1386; de la prière Jube, Domine « ordonne, Seigneur », dite en ce lieu♦ Tribune transversale en forme de galerie, élevée entre la nef et le chœur, dans certaines églises. ⇒ ambon.jubén. m.d1./d Galerie haute, en bois ou en pierre, qui sépare le choeur de la nef dans certaines églises gothiques.d2./d Par ext. (Québec) Galerie élevée au fond d'une église, souvent prolongée sur les côtés, où les fidèles peuvent prendre place.— Spécial. Jubé de l'orgue: tribune occupée par l'orgue.— Par anal. Balcon (d'une salle de spectacle).⇒JUBÉ, subst. masc.A. — Tribune élevée formant une sorte de galerie séparant le chœur de la nef de certaines églises anciennes, à laquelle on accède par deux escaliers latéraux pour y chanter, lire les textes liturgiques (notamment l'épître et l'évangile), faire certaines lectures publiques ou des prédications. Rampe du jubé; prendre place au jubé; jubé qui ferme la nef. Ce chœur est séparé de la nef par un jubé fermé, de la galerie circulaire des tombeaux par un jubé grillé et transparent (MICHELET, Journal, 1834, p. 149) :• Il est aussi contraire aux bonnes lois de l'harmonie que le chœur soit, à lui seul, plus long que la nef. Un jubé les sépare. Et, comme si ce n'était pas assez de cette barrière, ce chœur orgueilleux s'isole encore par une grille.MICHELET, Chemins Europe, 1874, p. 133.B. — Vieilli. Amener qqn à jubé; venir à jubé. Contraindre quelqu'un à se soumettre, l'amener à merci; se soumettre, venir à la raison par la contrainte. (Dict. XIXe et XXe s.).Prononc. et Orth. : [
]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1386-87 « portique surmonté d'une galerie séparant la nef du chœur d'une église » (doc. relatif à la cathédrale de Troyes ds Bibl. Ec. des Chartes, t. 23, 1862, p. 234). B. Ca 1470 venir a jubé « se soumettre » (G. CHASTELLAIN, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, IV, 412, 22). Du lat. eccl. jube (2e pers. du sing. de l'impér. de jubere « ordonner »), 1er mot de la formule par laquelle le lecteur, à l'office, demande la bénédiction de celui qui préside : jube, domine, benedicere « veuillez, Monseigneur, (nous) donner la bénédiction » (VIIIe s. Sacramentarium gregorianum ds BLAISE Liturg., § 62, note 1); cette demande était, en effet, à l'origine formulée depuis le jubé abritant, entre autres, une tribune servant aux lectures de l'office divin. B par emploi ironique de jube de la même formule liturgique, pour exprimer l'attitude de celui qui en est réduit à prendre des ordres, à se soumettre. Fréq. abs. littér. : 30.
jubé [ʒybe] n. m.ÉTYM. 1386; du premier mot francisé de la prière Jube, Domine… « ordonne, Seigneur… », prononcée en ce lieu, impér. de jubere.❖———I Archit. Tribune transversale en forme de galerie, élevée entre la nef et le chœur, dans certaines églises. ⇒ Ambon. || Monter au jubé. || Le jubé de Saint-Étienne-du-Mont, à Paris.0 Toujours, même dans les édifices les plus modestes, quelque curiosité retenait mon attention : des stalles, des miséricordes, un retable, un jubé, des statues de bois ou de pierre, des dalles gravées.S. de Beauvoir, Tout compte fait, p. 252.———II ☑ Loc. V. 1470, venir à jubé, du lat. jube « ordonne ». Vieilli. Amener qqn à jubé, l'obliger à se soumettre.
Encyclopédie Universelle. 2012.